Consommation abusive de Sodabi : la santé des jeunes en péril
- Posted on 13/01/2023 15:38
- Film
- By raymonddzakpata@sante-education.tg
Extrait de l'article: Dans les communautés, l’alcool est présent pour célébrer une naissance, pour accueillir un visiteur, ou encore pour fêter un mariage. Mais de plus en plus, les gens en consomment en dehors des fêtes culturelles, ou des événements de famille....
Dans les communautés, l’alcool est
présent pour célébrer une naissance, pour accueillir un visiteur, ou encore
pour fêter un mariage. Mais de plus en plus, les gens en consomment en dehors
des fêtes culturelles, ou des événements de famille. Aujourd’hui, la
consommation de ce produit est devenue une mode pour la population jeune et
adulte. Un phénomène inquiétant aux conséquences délétères sur la santé.
Selon un rapport publié par
l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’abus d’alcool a entraîné en 2016
plus de trois millions de décès, soit un décès sur 20. Plus des trois quarts de
ces décès concernaient des hommes dans le monde. Au Togo, une étude faite dans
le grand Lomé et ses environs, rendue publique en 2020 par l’ONG Recherche
Action Prévention Accompagnement des Addiction (RAPAA), a révélé que 67,20% des
jeunes de plus de 29 ans consomment de plus en plus de l’alcool. L’étude
précise que 77,5% des hommes consomment du Sodabi et ses dérivés contre 22,5 de
femmes. Il y a une recrudescence de cabarets partout dans la ville de Lomé où
les visites de jeunes sont récurrentes à longueur de journée. La consommation
d’alcool par les hommes est perçue comme un signe de virilité et de conformité
sociale.
Sodabi,
l’apanage des jeunes
A
Sagbado, un vendeur de « sodabi », tenancier d’un cabaret, interrogé
confie que « beaucoup de jeunes,
même dans la vingtaine viennent acheter ici. Le matin, déjà à 4h, on attend
toquer à la porte. Du coup, j’ai pris l’habitude de se réveiller tôt le matin
pour servir ses personnes. Toute catégorie de personnes vient acheter soit
« sodabi », « alomo », ou encore « vody ». Ainsi, dans certains coins défavorisés où la pauvreté a élu domicile et le
chômage a atteint des proportions inquiétantes, les vendeurs d’alcool se frotte
les mains. « Nos clients sont de plus en plus des jeunes. Le matin comme le
soir, ils viennent prendre soit des bouteilles de bière ou quelques verres de
sodabi », témoigne un détenteur d’un bar et d’un débit de Sodabi.
Chaque soir, vers 18h, l’on peut remarquer
dans le canton de Yokoè, non loin de la chefferie, un attroupement de jeunes
gens dans un cabaret. L’ambiance étant festive, on voit des jeunes avec des verres
de sodabi ou sachets de whisky à la main. En outre, ce ne sont pas
seulement des hommes qui visitent ces cabarets. L’on remarque des femmes
également dont la plupart sont des femmes au foyer entre 25 à 55 ans.
Ce qui pousse les jeunes à l’excès de Sodabi
Les problèmes
économiques et financiers, le stress et les conflits familiaux, la
précarité et l’absence de perspectives d’avenir tout comme l’affaiblissement du contrôle social expliquent
selon les personnes interrogées, l’augmentation
de la consommation de boissons alcoolisées. D’après l’Etude
socioculturelle et linguistique sur les boissons alcoolisées locales (Sodabi)
financée par la BOAD conduite par l’ONG RAPAA en novembre 2020, ces
modifications de comportements touchent particulièrement les femmes et les
jeunes. Concernant les jeunes, les enquêtés
ont cité le relâchement de la fonction éducative et du contrôle social, la démission des familles, les problèmes
spécifiques d’emploi que rencontrent les
jeunes ainsi que l’absence d’espoir en l’avenir. Les jeunes générations
semblent avoir plus d’attirance pour les
boissons importées et pour les lieux où ces boissons sont consommées tels
que les boites de nuit, les dancings, les bars.
Cependant son coût très abordable explique la forte consommation de Sodabi par les jeunes notamment les sans-emploi,
les étudiants, les scolaires et les apprentis
qui ont peu de moyens financiers.
L’alcool, solutions aux problèmes ?
Les
jeunes trouvent dans l’alcool, plaisir, énergie, solution aux problèmes. Les
jeunes ont aussi trouvé dans l’alcool, « un accompagnateur presque parfait »
pour oublier leur désarroi sur le plan social. Pour ces jeunes, en s’enivrant, il s’agit d’oublier tant soit peu le
quotidien qui se limite, pour la majorité détentrice d’un baccalauréat et plus
encore, à des petits boulots au grand marché de Lomé, entre autres, conducteur
de moto ou de pousse-pousse. L’alcool est le « chasse souci ». « Je viens prendre chaque soir, ici deux à trois verres de sodabi. Cela
me permet de bien manger un fois arriver à la maison. En plus, je viens ici
parce que c’est l’un des moments où je discute avec les amis sur des sujets
diverses entre autres la politique, nos problèmes de foyers. Ici, il n’y a pas
d’ennuis en tout cas », a déclaré Yves, mécanicien de 33 ans. Quant à Yohannes, 35 ans, cuisinier dans un
restaurant de la place, « je passe
au cabaret pratiquement tous les matins et soirs, pour prendre un verre. J’aime
sodabi tout simplement. Et cela me permet d’être au top au boulot. Ici, on
forme autour de ces verres, une grande famille ».
L’on remarque aussi que certains
consomment du sodabi en cas de maladie. Ils le font pour traiter de nombreuses
maladies entre autres paludisme, constipation
l’anorexie, règles douloureuses, les plaies,
les maux de ventre, les maux d’oreille, les hémorroïdes, maux de tête, les maux
de hanche, les infections mais aussi l’énervement et la faiblesse sexuelle. « Personnellement quand je ne consomme pas de sodabi, je sens une fatigue
intense. Et aussi, je sens mes mains trembler. En ce moment, si je prends juste
un verre, cela se calme. Donc pour moi sodabi est une source antifatigue. Cela
m’arrive de prendre juste deux verres et arachides 100frs le matin, c’est parti
pour le soir que je mange », affirma Beau-gars, peintre d’environ 40
ans.
Effets
néfastes sur la santé
Les gens ont l’impression que le seul
méfait lié à l’alcool c’est de développer de l’alcoolisme. Or l’alcool est
responsable d’une série de maladies chroniques, l’OMS en a identifié 40,
causées par l’alcool. Chaque verre augmente le risque. Beaucoup de maladies surviennent après un
alcoolisme prolongé. Ces maladies sont entre autres les maladies gastriques,
sept types de cancer entre autres cancers du sein, de l’œsophage, du côlon,
maladies du foie et maladie cardio-vasculaire. Les
signes d’abus d’alcool sont : vieillissement précoce, rougeur des lèvres,
des yeux, gonflement du visage, changement de teint,
modifications corporelles.
Raymond Dzakpata